Malgré l’heure, il n’a pas sommeil, il a dormi pendant des semaines. Les autres pourtant, vaincus par des heures d’excitation, se sont assoupis, se laissant emmener en confiance. Il leur avait promis, le répétait chaque fois que l’un d’eux perdait espoir, il est heureux de pouvoir enfin tenir sa promesse.
La soirée avait été agitée, les enfants ne tenaient pas en place. Depuis que le gouvernement l‘avait annoncé, ils avaient déclenché un compte à rebours qui allait bientôt se terminer. Sa femme avait jeté quelques vêtements dans une valise, de quoi tenir deux ou trois jours. Comme elle aussi tournait en rond, elle s’était mise à confectionner une pile de sandwiches bien trop haute pendant qu’il fixait l’horizon, appuyé contre l’unique fenêtre du petit appartement.
À minuit pile, ils avaient descendu l’escalier pour rejoindre leur voiture. Des gens sortaient des immeubles environnants, un peu hébétés, encore réticents à serrer la main des voisins qu’ils n’avaient pas approché depuis si longtemps. Ils couraient presque en arrivant à leur véhicule qui avait démarré du premier coup dans un grand cri de joie.
Il sort de l’autoroute et s’engage sur la nationale qui continue vers l’est, toujours vers l’est, le plus à l’est possible, jusqu’à cette petite pointe de terre au bout du pays. Devant lui, le ciel n’est plus tout à fait noir, il sourit. Il arrête la voiture au bord de la route déserte et réveille sa famille. Serrés les uns contre les autres, ils contemplent la mer quelques mètres plus bas, et l’horizon. Ils seront les premiers à voir le soleil se lever, il leur avait promis.
Hervé Hue
Le 11 mai
Le réveil sonne
Résonne dans ma tête,
Allez lève-toi
C’est l’heure
Heure de quoi ?
Mais du déconfinement !
Ah oui c’est vrai nous sommes aujourd’hui le 11 mai !
Je sors,
La ville en effervescence, des voitures, un brouhaha inhabituel depuis le confinement,
Tous se ruent sur les routes,
La nature est envahie et l’homme reprend ses droits,
Et devant moi, des files d’attentes impressionnantes,
Devant le coiffeur, le boucher, l’épicerie fine, le libraire, le fleuriste…
À croire que chaque citoyen veut dépenser ses deniers jusqu’au dernier.
Chacun s’offre des fleurs,
Et toi, je te cherche parmi la foule mais je ne te vois pas…
Où es-tu ?
Eh oui ! J’avais oublié : tu es encore confinée
À la Roseraie alors je cours, je vole pour venir te revoir
En chair et en os après cette période, cette situation inédite.
Blandine Bayet
Nous l’avons désiré et il est arrivé, ce jour d’après où nous allons enfin pouvoir nous retrouver. Après l’angoisse, les interrogations, les frustrations, ce temps inhabituel, un peu hors du temps où nous avons mis à rude épreuve nos capacités d’adaptation. Nous nous sommes découverts, redécouverts, avec des ressources dont nous ne connaissions pas l’existence et avons pris peut-être conscience que nous étions des étrangers pour nous-mêmes. Nous avons pu réfléchir à ce que nous voulions vraiment dans nos vies. Nous avons peut-être trouvé, retrouvé, un calme intérieur qui avait disparu depuis longtemps, happés en permanence par un quotidien qui nous demande sans cesse de « faire » ou oubliant « d’être ». Nous avons été à la rencontre de nos fragilités, nos dépendances, nos peurs, nos freins et il s’agit de les dépasser à présent afin de sortir grandis de l’épreuve. Et nous avons le choix de faire ou pas cela. Aujourd’hui, nous apprécions ce que finalement nous avons toujours eu, sauf qu’aujourd’hui nous en apprécions la saveur, le nectar comme jamais. Le simple fait d’être là, bien en vie, est déjà un cadeau que nous ne mesurions pas jusqu’alors. Être libre d’aller où l’on veut, sans avoir à rendre de compte, sans avoir à réfléchir. Un peu comme ce grand verre d’eau fraîche quand le soleil nous a déshydratés, ce fruit juteux et rempli de saveur alors que la faim nous tenaille… Et si c’était ça le jour d’après ?
Martine Levy
Le réveil sonne et je mets un petit moment à réaliser quel jour on est et qu’il faut aller travailler… Je donne un baiser à ma douce qui doit se lever plus tard et je vais préparer le café en écoutant la radio. La première nouvelle que j’entends c’est que François Pinaut a donné cent millions d’euros pour les commerces et les PME en difficulté. De son côté, Bernard Arnaud en a donné deux cents. Ça m’aide à me lever et je me réjouis à l’idée de retrouver mon patron et de voir sa tête quand il va apprendre ça. Pendant que je prends mon petit déjeuner, j’apprends encore que les laboratoires pharmaceutiques débloquent cinq cent millions pour les hôpitaux, Gérard Depardieu et quelques autres stars à sa suite ont également puisé dans leurs fonds personnels pour aider les intermittents du spectacle et les organisateurs des festivals qui ne rouvriront pas cette année. Quelques footballeurs stars ont également donné à des associations humanitaires.
Je prends le métro qui est presque vide, les gens sont détendus, certains sourient. Cette journée commence décidément très bien. Arrivé au boulot, nous sommes heureux de nous retrouver entre collègues et chacun y va de ses anecdotes de confinement, y compris René qui avait l’habitude de tirer la gueule dans son coin. Mon boss m’apprend qu’il va finalement pouvoir tous nous garder, parce qu’avant la crise il était question d’en virer quelques-uns pour raisons économiques. La journée se déroule sans encombre et je vais chercher les enfants à l’école, qui me disent qu’ils étaient cinq dans la classe. Leurs copains leur ont manqué, mais ils ont surtout fait des jeux pour se remettre dans le bain en douceur. Nous rentrons en parlant des prochaines vacances et de leurs papi et mamie qui leur manquent.
Arrivés à la maison, quelque chose cloche : la porte est ouverte. Je dis aux enfants de rester dehors, je rentre doucement et découvre avec stupéfaction que la maison est vide. Il n’y a plus de meubles, plus rien, elle est totalement vide ! J’appelle ma femme, désespérément, je crie son nom, je crie… Je me réveille en sursaut.
Anonyme
Le premier jour d’après ?
De l’air ! De l’air ! De l’air !
Le premier réflexe, un réflexe… pulmonaire
pour qui a confiné 55 jours, 55 nuits, en Twenty-Twenty !
Les premiers pas hors de chez soi.
Franchir le seuil, de l’intérieur vers l’extérieur, le cœur en joie.
Respirer… Respirer un air de liberté
pour qui a expérimenté la captivité !
Quitter les sphères de l’oppression, la peur, la mort, l’isolation.
Au feu les addictions ! Au feu les méditations !
De tant de compression, le bloc tête-cœur-poumons
appelle le grand large, la joie, sur le dos d’une oie sauvage !
La démangeaison des ailes impose sa raison.
Sur tous les fronts malmené
le corps réanimé va chercher… et trouver son immunité.
Le premier jour d’après ?
Secouer les fourmis de ses pieds.
Pour les pieds, pour le cœur, pour la tête, c’est la fête !
S’émerveiller sur la nature printanière…
Suivre le vent jusqu’à la mer…
Sans dépasser – il va s’en dire – les limites imposées.
Partager une collation, partager les émotions…
Trinquer, danser, chanter, qui sait ?!
Le virus à découronner !
Conjurer le sort, conjurer la mort.
Le premier jour d’après ?
Le désir, ce moteur de la vie, tient les rennes et conduit.
Vers où ? Vers quoi ? Vers qui ?
Un dernier fragment de vie…
Quitter la servitude des habitudes.
Plus rien comme avant !
Les premiers pas sur une nouvelle voie…
Les projets tombent à l’eau.
Accueillir le renouveau.
Prendre soin, prendre soin…
S’incliner humblement.
Sauver le sourire d’un mourant, sauver le rire d’un enfant.
Et si masque s’impose, offrir le sourire d’un regard bienveillant.
Contaminer les âmes ! Contaminer les cœurs !
Un défi de bonheur !
Le premier jour d’après ?
C’est le premier de cordée qui ouvre la voie
à inventer tous les possibles.
Ce jour-là, et tous les autres qui vont suivre.
Le premier jour tant espéré engage notre souveraine liberté !
Catherine Mauger-Trouiller
Presque
Chaque situation révèle le pire et le meilleur en nous : nos peurs les plus profondes mais aussi nos trésors les plus inestimables. L’attachement aux personnes que l’on aime brille toujours plus fort en leur absence. D’habitude, il y a dans ma vie ces gens que j’aime d’une façon particulière : vous, mes patients. Tous les jours, l’humanité présente en chacun de vous me bouleverse, m’émeut et parfois me bouscule dans mes certitudes. Tous les jours, vous m’apprenez – de par vos différences – la tolérance, l’écoute et l’amour inconditionnel. Tous les jours, j’ai le cœur qui déborde de gratitude pour la confiance que vous m’accordez.
Le 11 mai 2020. J’imagine mon arrivée au cabinet le matin. Il fera beau ce jour-là, forcément. Mes plantes auront souffert de mon absence. Je prendrai le temps de les cajoler. Ensuite, je reprendrai mes rituels : aérer mon espace, faire brûler de la sauge. Puis, le moment viendra d’accueillir ma première patiente. On sera émues, on se prendra dans les bras. Je sentirai mon cœur s’ouvrir en l’écoutant me raconter son confinement, ses craintes et ses prises de conscience. Ensemble, nous plongerons avec bonheur dans cette qualité de présence que nous offre l’état de relaxation. Et presque tout sera comme avant. Presque. Et ce sera tant mieux que ce soit juste presque comme avant. Sinon, à quoi bon tout ça ?
Accompagner les gens en dehors de leur zone de confort, c’est mon métier. Aussi, je vous souhaite à tous que cette période vous ait apporté l’inconfort nécessaire pour amorcer un changement qui couvait depuis longtemps en vous ; qu’il soit relationnel, professionnel, physique ou autre. Que ce repli forcé vous ait permis de vous révéler quels sont vos véritables trésors dans l’existence.
Pour ma part, je sais – avec plus de force encore – que les êtres humains avec qui j’interagis au quotidien sont mes trésors les plus précieux, et notamment vous, mes chers patients. J’occupe cette place privilégiée parce que vous me l’offrez. Tous les jours, j’apprends et je grandis, grâce à vous. Nos rencontres sont riches et uniques pour moi aussi et elles m’ont manqué pendant cette période.
Alors, je vous dis merci et à bientôt.
Cécile Blanche
Le jour d’après ? Celui qui est juste après celui qui a précédé ?
« Ah, Petite Luciole, il n’y aura rien de changé, le jour d’après. Les hommes reviendront à leur mauvais travers.
— Ah bon, pourquoi ?
— Parce qu’ils sont restés dans la matérialité du virus et de sa propagation. Ils ne l’ont pas regardé sous le bon angle. Ils n’ont pas eu le regard juste, répondit la Voix.
— C’est quoi un regard juste ? questionna Petite Luciole en secouant ses ailes diaphanes.
— C’est regarder au-delà de ce que l’on voit, aller derrière le miroir.
— Et ça a changé quelque chose ?
— Tout ! À mauvaise analyse, mauvaise réaction, reprit la Voix.
— Mais un virus, c’est un virus ! C’est une chose dangereuse qui tue ! s’exclama Petite Luciole, en écarquillant les yeux.
— Vois-tu, lorsque tes yeux observent un objet, un acte, une situation, c’est ton mental qui orchestrera les événements qui suivront. Si ta vision est tronquée, alors tes actions deviendront des erreurs.
— Mais dites-moi, la Voix, tout le monde n’est pas pareil. Pourquoi seraient-ils tous punis, alors ?
— Parce que si tu réalises ce qui se passe et que tu ne corrige pas celui qui est dans l’erreur, tu deviens le même que l’autre et donc, tu dois régler ta dette de la même manière. Cela s’appelle le karma, Petite Luciole.
— Alors, il n’y a rien à faire ? s’inquiéta Petite Luciole, attristée.
— Il y a très longtemps, dans un pays lointain, la Chine, un vieux sage a dit : le poisson ne voit pas l’hameçon, il ne voit que l’appât.
— Mais… si les hommes changeaient ?
— Alors tout deviendrait différent et on verrait l’espoir renaître comme un cerisier au printemps », dit la Voix, émue.
La Voix posa son regard sur Petite Luciole, mais cette dernière s’était endormie.
Marianne Gibert
Un jour mon amour
On se regardera
Les rêves pleins les yeux
À faire pleurer tout bas
Un jour les années
Réchaufferont nos cœurs
Tu pourras à nouveau
Embrasser mes frayeurs
Il y a si longtemps
Que la mort est passée
Je ne me souviens plus
Ce qu’est l’immensité
Un jour ton visage
Reverra le soleil
Le vent à travers ciel
Soufflera nos baisers
Un jour dans ta main
Je mettrai mon chagrin
Pour caresser ta peau
De la douceur d’un doigt
Il y avait si longtemps
Qu’on pouvait se dire tu
Pouvoir se reconnaître
Par-delà les barrières
Un jour tout doucement
On se fera l’amour
J’appuierai mon épaule
Au creux de tes soupirs
Un jour qu’il fait beau
Nous nous endormirons
Au gré d’un autre monde
Qui nous aura choyé
Il y a si longtemps
L’homme aura oublié
Qu’il a tué le passé
À vouloir le gagner
Il y aura longtemps
Quand tu m’emporteras
Je viendrai dans tes nuits
Prêt pour mon grand voyage.
Jean-François Jabaudon
Le 11 mai 2020, un jour bien ordinaire depuis toujours mais qui deviendra une date anniversaire pour beaucoup d’entre nous. Il y a quelques semaines, qui aurait pu penser cela ?
Et moi, que ferai-je ce jour-là ?
Je pense que la nuit du 10 mai va être longue, je ne vais pas dormir ou du moins très peu et mal, c’est une certitude. Le 11 à minuit moins vingt je vais quitter mon lit, me lever et me rendre dans la cuisine pour préparer un café. Le temps que la mixture passe dans la machine, la pendule égrènera lentement, trop lentement les minutes qui me séparent de la liberté. Je prendrai ma grande tasse favorite et l’emplirai à moitié avant d’y verser un nuage de lait demi-écrémé. Vêtu d’un seul caleçon, torse nu, je fixerai les aiguilles de l’horloge, souhaitant impatient le douzième coup de minuit.
Enfin, la grande aiguille franchira le douze, nous serons le 11 mai.
Je serai fébrile en ouvrant la porte d’entrée. Je franchirai le seuil et me retrouverai sur le trottoir. Un geste simple, répété des milliers de fois, mais tellement symbolique aujourd’hui. Fini l’attestation, fini les contrôles, je régalerai mes papilles en dégustant lentement mon café et comblerai mon cerveau en savourant ma liberté retrouvée.
Jamais elle ne m’a tant manqué, depuis des jours je vis confiné et mes seules sorties sont rythmées à une autorisation écrite qui brime mon droit à me déplacer librement.
Quand je regardais un film de guerre, je ne mesurais pas à quel point il est douloureux d’être sous le joug d’un règlement inquisiteur. Je ne regarderai plus avec le même esprit les maquisards qui se font contrôler par la Gestapo, je comprends mieux la peur, la rage, la colère.
Avant les réseaux sociaux, nous n’avions que des bribes d’informations, mais aujourd’hui après avoir vu les infirmières et les Gilets jaunes se faire matraquer par la police, après avoir vu des gens de bonne foi se faire verbaliser comme des bandits pour une simple erreur sur l’attestation de sortie alors que certains ne respectent aucun confinement mais ne sont pas inquiétés, les forces de l’ordre que je soutenais me font peur.
Dès qu’une voiture de police me croise, mon estomac se serre. J’ai la hantise qu’elle s’arrête, je me demande si je suis bien en règle, si je ne vais pas tomber sur des policiers tatillons à la recherche du plus grand nombre de verbalisations.
Ce n’est peut-être qu’une impression, peut-être le fruit de mon imaginaire, mais j’ai le sentiment que mon pays chéri est gouverné par le profit.
Je suis déçu aussi par tant de vedettes, de sportifs de très haut niveau, de grosses fortunes. Pourquoi ne se mobilisent-ils pas plus pour remettre en marche notre pays ? Pour eux, c’est une goutte d’eau de donner pour payer mieux le personnel hospitalier, pour produire des produits français.
Je ne parle pas des politiciens, aucun exemple à attendre d’eux, quel que soit le parti, c’est chacun pour soi, le peuple et eux c’est deux mondes différents.
C’est utopique, mais seul l’argent est important aujourd’hui et c’est bien dommage.
Je ne sais pas si je retrouverai toute ma sérénité, si je pourrai à nouveau vivre libre, mais je suis certain que jamais plus cela ne sera comme avant.
J’ai voté pendant presque 50 ans, j’ai connu la droite longtemps, j’ai vécu l’arrivée de la gauche, la joie l’espoir les rires du peuple confiant, puis la désillusion.
Aujourd’hui, ce n’est ni droite ni gauche, mais qu’est-ce que c’est ?
Je ne juge personne, je constate simplement que les problèmes sont de pire en pire. Les politiques ont réussi à perdre la confiance et ce sera sans doute le plus difficile à retrouver. Quand j’étais jeune, les ouvriers trimaient et se privaient pour payer des études et un avenir à leurs enfants. Beaucoup de belles promesses pour peu de résultats.
Aujourd’hui, le SMIC, le chômage sont le lot de beaucoup. Les retraites s’éloignent et arrivent à peine à faire vivre dignement les aînés, rien ne change.
Les riches sont toujours aussi riches, voire plus. Mais ceux qui votent les lois demandent toujours plus d’efforts au peuple, mais ne s’incluent pas dans le peuple.
Une nouvelle donnée s’invite maintenant, c’est la peur de la maladie mortelle et je pense que tout le monde sera attentif au moindre symptôme qui mettrait sa vie en péril.
Je pourrai peut-être marcher libre de mes mouvements, mais mon esprit restera longtemps emprisonné par la crainte d’une récidive et d’une infection qui peut mener à une agonie lente et douloureuse.
J’espère que le temps fera son œuvre, que les choses redeviennent plus ou moins normales, mais j’ai peu d’espoir et encore moins de foi dans les gouvernants, quels qu’ils soient.
Au moindre signe d’alerte, chacun se repliera dans l’angoisse et la peur.
Le 11 mai, si la liberté revient, nous serons très prudents, verrons nos enfants et petits-enfants avec les gestes adaptés pour les protéger et nous ferons un bon repas pour profiter de la vie avant qu’elle ne nous file entre les doigts.
Jean-Claude Van Der Messe
Le jour d’après,
Un horizon qui s’élargit. Un inconnu à apprivoiser. La liberté derrière les murs du jardin. Mais, sera t-elle la même que celle d’avant ? Elle sera surveillée, contrôlée, encadrée. Elle ne sera que le pâle reflet de celle que l’on connaissait et que l’on pensait acquise.
Vivre au milieu d’inconnus et d’interdits. Sortir mais surtout rester seul. Revoir tous ceux qui nous ont manqué mais ne surtout pas les embrasser. Sortir et se heurter à la méfiance et à la peur. Sortir et ne pas pouvoir faire ce qui nous plaît. Pourtant, nous serons encore en mai.
Notre seule liberté résidera dans le choix de notre protection. Face à l’autre, à cet homme ou à cette femme que l’on rêvait de serrer à nouveau dans nos bras mais qu’il faudrait se contenter de regarder à distance, quel type de masque porter ?
Le monde va devenir un immense zoo dans lequel les hommes s’observeront sans agir. L’individualisme reprendra tout naturellement sa place, guidé par la peur.
Le jour d’après,
Des habitudes à inventer. La nécessité de se raccrocher à avant, faire comme si rien n’avait changé alors que plus rien ne sera jamais plus pareil. Envolée la spontanéité. Effacée l’insouciance. Oublié le bonheur d’une main sur la sienne ou d’un baiser.
Nous serons condamnés à vivre dans un monde factice où le moindre geste devra être autorisé, sous contrôle. Faudra-t-il aussi menotter ses sentiments ?
J’en ai tant rêvé de ce jour d’après, imaginé mille et un scénario et maintenant qu’il est à portée de calendrier, je voudrais qu’il n’arrive jamais ; qu’il soit définitivement rayé du calendrier. J’ai peur de ne pas avoir suffisamment de force pour affronter ce nouveau monde hostile, cette jungle masquée. Ma seule envie est la liberté, désormais impossible, interdite.
Le pire n’est pas derrière nous. Il commencera le jour d’après.
La réalité a dépassé la fiction. Ce texte ne peut rivaliser avec ce présent riche de chaos et de rebondissements meurtriers. Il n’est pas une nouvelle, à moins que le jour d’après soit sa chute.
Le jour d’après, celui où je regretterai le plus celui d’avant.
Magali François
Ah les amis quelle gueule de bois, je ne comprends pas pourquoi ni comment ?? Veux tu parler doucement, ma chérie, des taikos percutent mon crâne, détruisent mon cerveau !! Prépare-moi un peu de jus de fruits avec un comprimé effervescent s’il te plaît, merci. Que s’est-il passé ? Je ne garde aucun souvenir des dernières heures passées. Normalement, j’étais seul en raison du confinement, et tu veux me certifier qu’à moi seul, j’ai bu tout ce qui jonche le tapis ??
Je confirme, tu as débouché pour commencer un whisky tout à fait ordinaire, d’où ma surprise, ma stupeur. Foin de vieux breuvage tourbé ou vieilli dans un fût ayant contenu du cherry, non un Label rouge, une marque inconnue, venue d’Écosse, un Mac Rhon de 3 ans d’âge, juste bon avec du Coca !! Au troisième verre, tu as vidé la bouteille dans l’évier, tu sentais déjà des crampes d’estomac s’installer.
Alors pour te remettre, tu as débouché une bouteille de Saint-Véran. J’ai cru comprendre que ce blanc délicat, sec, allait te ragaillardir, te revigorer, et tu as ajouté que l’image de la Roche de Solutré ne pouvait que te redonner de l’espoir. Encore un espoir qui s’envole, Véran peut-être, mais sans le Saint !!!
Avais-tu déjà trop testé, toujours est-il que tu t’es lancé dans une diatribe dont tu as le secret ! Je n’ai pas tout compris, ta langue devenait un peu pâteuse, lourde ; ton élocution, improbable, discutable. Quant au ton, tu ne parlais plus, tu hurlais, heureusement que nous vivons en pavillon !
Je ne sais pas ce que tes copains Doudou, Philou, j’ai eu peur que tu ne dises aussi Fifi et Riri, que c’était du beau, une honte que tu étais au taquet avec ce confinement.
Brusquement tu t’es levé, tes mocassins t’ont conduit dans le garage où dort sagement la cave à vin. Tu en es revenu avec deux bouteilles de Premières Côtes de Bordeaux, un Château Cluzel. Je t’ai demandé : « D’où sort-il ?? » Tu m’as répondu : « Mais si tu sais, je l’ai acheté quand nous avons passé une semaine de vacances à Saint-Cyprien, en Dordogne. »
Je t’ai abandonné à ta soulographie, je redoutais de devoir appeler le SAMU pour un coma éthylique.
Au matin, le 12 mai, ce matin-là ressemblait à celui de la veille, le confinement continuait, les aides infirmiers et les infirmiers ainsi que tout le personnel hospitalier caressaient de doux rêves, regardaient tomber du ciel des promesses à la place des billets de banque, les services de réa évacuaient discrètement sur l’arrière du bâtiment les malades plus ou moins vieux, enfin plus que vieux dans le « chapiteau » installé discrètement. Les cornes ornaient maintenant les fronts des blouses blanches, bleues, noires des sacs-poubelle, les courbes allaient repartir à la hausse comme en Asie, en Chine, à Singapour…
Envolés les rêves de défilés, de Tour de France, du foot… La solidarité ? La responsabilité individuelle et collective ?? Les déclarations des spécialistes ?? Les banques, la SNCF, Air France… et moi et moi !!!
Les masques tombent les uns après les autres, les beaux discours, et le vent les emporte… Adieu Prévert, adieu Kosma, adieu Cora…
Mon souhait : que ma gueule de bois se termine, mais quand ? Fin juin ? Pourquoi ?? Pour déboucher quelques très bonnes bouteilles pour les déguster avec autour de moi, des tas de bras tendus, pour que je les remplisse de bulles ou autres breuvages, le sang de la vigne. Partager à nouveau.
Gym

Emotion, rêverie, poésie, utopie, exotisme même avec une petite luciole,ou philosophie, je ne saurais dire mon QI n’a qu’un chiffre!!
j’ai trouvé beaucoup d’humanité et de nombreuses promesses faites à qui? pourquoi?? Et si nous faisions une » Bruel » sur la place des » petits hommes » ??
Un clin d’oeil, tendre à deux d’entre vous.
J’ai beaucoup aimé ton billet d’humeur » mon camarade » Jean-Claude VDM.
A toi Hervé H, un grand sourire et un zeste d’humour, mais peut être bien qu’en roulant vers l’Ouest, tu trouveras une grande flaque bleue, salée, très rapidement!!Pour la mer Noire ou la Caspienne, ajoute des sandwiches. Très cordialement J’ai aimé, sincèrement.
Merci à vous de chez BOD qui avaient bien oeuvrés. Respects.
C’est un très beau message passé en expliquant la situation actuelle, Montrant que l’homme est idiot parfois il ne retiens pas la leçon et ne voit pas les conséquences dans ces actes.
Merci Marianne Gibert pour ce message
Ricardo
J’ai bien aimé le texte de Marianne GIBERT.
Triste et tellement vrai à la fois.
La voix et la petite Luciole nous permettent de nous remettre en question sur notre quotidien pour mieux avancer…
Bonne réflexion !!! Y aura-t-il une suite ?
La Petite Luciole et la Voie de Marianne GIBERT représentent super bien la Réalité du moment entre le Réel et l’Irrationnel. L’Imaginaire collectif et la Conscience s’affrontent dans un jeu verbal qui nous porte à nous questionner sur notre avenir. Merci Marianne pour ce texte superbe à lire sans modération …
Je vote pour Marianne Gibert
Je vote pour Marianne Gibert
Bravo à Marianne. J’ai adoré son texte et son histoire.
Bonjour. J’ai aimé et me suis laissé emporté avec le texte de la luciole, celui de Marianne. Tendre, poétique et rêveur !!! Bravo
J’ai beaucoup aime le texte qui parle du virus!
Vision inattendue dans ce dialogue entre une voix et une petite luciole qui nous donne un autre regard de notre confinement et du déconfinement.Une pensee vers le message cache derriere cet evenement.
Un style agréable qui nous donne envie de lire d’autres choses de cet auteur Marianne Gibert.Merci pour compartir.
J’ai aimé la luciole et la Voix de Marianne Gibert pour la simplicité du genre qu’est le dialogue, la pensée que celui-ci dispence. Marianne nous invite à nous questionner outre le phénomène égoïque sur le monde, la vie, l’humain et la condition de l’existence … Bravo
Marie Claire
Très beau message passé à travers ce texte qui illustre parfaitement bien la situation actuelle.
Très agréable à lire.
Bravo Marianne Gibert.
Je suis comme cette luciole étonnée de voir qu’une chose si importante provoque tellement peu d’impacts chez l’homme, du moins si peu de temps.
Hélas…
Les hommes se soucient peu du danger, ils ne pensent qu’au gain.
L’histoire de ce covid est la, finement raconté, avec la douceur des questions de cette luciole surprise, et la voix qui est là pour répondre clairement à ce qui devrait être évident, ce qui aurait dû nous affecter bien plus.
Impactée et encore avec des traces, je suis certaine d’avoir changé, je puiserai de mes mots si il le faut pour libérer ceux qui sont pris dans la mauvaise vague.
Un GRAND Merci a Mme Gibert Marianne pour ce jolie texte qui m’a touché et que je qualifie aussi beau que le cerisier au printemps.
Sonia
Merci pour ces textes magnifiques. Celui de Mariane GIbert m a notamment beaucoup inspiré. Quel beau dialogue, empreint de spiritualité avec :
– la luciole, symbole de la fugacité de la vie et/ou de lumière dans l’obscurité
– la voix qui m’apparaît comme la connaissance, la réflexion
– la notion de Karma qui renvoie à la renaissance (monde à réinventer après Covid19?) mais aussi au fait que tout est lié dans l’univers.
Allons nous continuer dans un cercle vicieux ou un cercle vertueux ? Ne nous rendormons pas. Merci beaucoup de nous inciter à bien réfléchir via ce dialogue vraiment philosophique. Muriel